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Qu’est-ce qui fait qu’une thérapie aide ou non le client ?

Dernière mise à jour : 16 nov. 2018


L’alliance thérapeutique – la part du thérapeute

Dans un billet précédent, j’ai cité des méta-analyses (analyses statistiques faites pour résumer les données de nombreuses études) qui établissent deux choses : “La recherche établit clairement que la psychothérapie est efficace ... avec les divers groupes d’âge.” et deuxièmement que les différentes méthodes psychothérapeutiques sont foncièrement d’une efficacité égale; l’explication est que toutes les méthodes comportent des éléments communs. Donc peu importe l’approche thérapeutique, la guérison dépend surtout d’autres choses. Aujourd’hui, je veux traiter de la plus importante de ces autres choses.

De nouveau, je veux rendre à César ce qui lui appartient; ce que je vous présente est en partie, l’oeuvre de Yves Gros-Louis, psychologue, dont j’ai suivi la formation l’an dernier.

Examinons le plus important de ces facteurs communs, l’alliance thérapeutique.


L’alliance thérapeutique

Selon de nombreuses études, c’est la qualité de l’alliance thérapeutique qui prédit le mieux le succès d’une thérapie. Qu’est-ce qu’on entend par l’alliance thérapeutique ? Tout simplement, la relation d’aide dans laquelle client et thérapeute travaillent ensemble pour résoudre le problème présenté dans la thérapie. Il s’agit d’une collaboration basée sur une analyse commune du problème et un accord sur les solutions possibles. Dans un premier temps, que peut faire le thérapeute pour établir l’alliance thérapeute ?

       

Dans Le Développement de la personne, Carl Rogers pose quelques questions très pertinentes à l’établissement d’une relation d’aide, de l’alliance thérapeutique.


En tant que thérapeute, “Puis-je arriver à être d’une façon qui puisse être perçue par autrui comme étant digne de confiance, comme sûre et conséquente au sens le plus profond ?” Selon lui, la réponse à cette question dépend de ma capacité à accepter mes clients, sans les juger. Qu’on puisse compter sur moi comme un être réel et non un être faux. Personne n’aime se faire juger. Habituellement, les clients se dévoilent graduellement. Ils testent le thérapeute pour voir s’il les acceptent, s’il les juge.


Il juge cette 2ième question très proche de la première, “Est-ce que je peux communiquer sans ambiguïté l’image de la personne que je suis ?” Autrement dit, suis-je vrai, authentique ? Est-ce que je me montre tel que je suis ? Est-ce que je suis à l’aise dans la situation thérapeutique, avec mes émotions, mes pensés et aussi mon malaise ? Lorsque mon attitude reflète l’agacement que j’éprouve vis-à-vis de quelqu’un mais que je n’en suis pas conscient, ma communication transmet des messages contradictoires.” Dans ce cas, j’émets un double message: il y a contradiction entre mon message verbal – l’acceptation (acceptation ne veut pas dire approbation) de l’infidélité du client et mon message non verbal de non acceptation de son infidélité. Cette opposition inconsciente en moi créera de la confusion chez le client, ce qui le rendra moins confiant.


Sa troisième question est la suivante, “Suis-je capable d’éprouver des attitudes positives envers l’autre : chaleur, attention, affection, intérêt, respect ?”


La quatrième consiste en ceci, “Ai-je une personnalité assez forte pour demeurer indépendant de l’autre ?” Suis-je suffisamment autonome “pour ne pas être déprimé par sa dépression, angoissé par son angoisse ou englouti par sa dépendance ? ... Quand je peux librement ressentir cette force qu’il y a d’être une personne entière, distincte (individualisée), alors je découvre que je peux me consacrer plus entièrement à comprendre autrui et à l’accepter parce  que je n’ai pas la crainte de me perdre moi-même.” Par contre, si je ne suis pas suffisamment séparé, individualisé, je risque de confondre mes affects avec ceux du client. C’est pour éviter cette fusion et le manque de liberté d’être soi-même que les clients disent qu’ils n’aiment pas parler de certaines difficultés avec leurs parents, leur conjoint(e) et même leurs ami(e)s proches. Ils ne veulent pas accabler leur parent de leur tracas. Ils ne veulent pas que l’autre les prenne en pitié ou qu’ils sautent aux conclusions.

Au pis aller, si cette distance n’est pas maintenue, si l’aidant se laisse trop atteindre, il y a risque de stress traumatique secondaire. Les policiers, les ambulanciers, les répartiteurs d’ambulances, les infirmières, les travailleuses sociales sont exposés au stress traumatique secondaire aussi appelé fatigue de compassion (voir www.motssociaux.com)


Cette question suit étroitement la précédente : “Ma sécurité interne est-elle assez forte pour permette (au client) d’être indépendant ? Suis-je capable de lui permettre d’être ce qu’il est – sincère ou hypocrite, infantile ou adulte, désespéré ou présomptueux ? Puis-je lui accorder la liberté d’être” ce qu’il est ? Ou est-ce que je pense qu’il devrait me prendre pour modèle ? Ce n’est pas évident d’accepter que l’autre agisse contre son propre bien-être et que je ne puisse pas l’aider, c’est-à-dire vivre de l’impuissance. Songer aux rêves dans lesquels vous assistez impuissant  à la détresse de quelqu’un.


Et la dernière : “Puis-je pénétrer dans son univers intérieur assez profondément pour perdre tout désir de l’évaluer ou de le juger ? ... Puis-je comprendre cet univers ... pour saisir non seulement les conceptions de son expérience qui sont évidentes pour lui, mais aussi celles qui sont implicites et qu’il ne voit qu’obscurément ou confusément ?” Vous avez deviné; c’est ce qu’on appelle avoir de l’empathie. C’est voir la réalité telle que l’autre la voit, à travers ses yeux afin de le comprendre afin qu’il se sente compris et aussi la capacité de lui restituer ce que j’ai compris.


En bref, Carl Rogers a bien défini les qualités que le thérapeute doit démontrer pour établir l’alliance thérapeutique : l’empathie, l’authenticité, la chaleur humaine. Et selon les recherches de Gros-Louis, l’alliance thérapeutique ou la relation d’aide est ce qui amène le succès de l’intervention et non l’inverse.


Par ailleurs, la période critique pour bâtir l’alliance est le tout début de la thérapie car elle ne tend pas à s’améliorer par la suite. Étant donné, l’importance d’établir l’alliance dès le début, pour connaître la perception du client de l’état de l’alliance, j’utilise un questionnaire mis au point à cet effet. Il s’agit de l’Échelle d’évaluation de la séance (SRS V.3.0) que l’on trouve en ligne. Il comporte quatre échelles : Relation, Objectifs de travail et sujets de discussion, Approche ou méthode, Séance dans sa globalité.


Trente secondes suffisent à le compléter et les résultats se constatent en aussi peu de temps. Le cas échéant, je peux discuter avec le client les changements à apporter à la prochaine rencontre. Pourquoi demander de la rétroaction par écrit ? Parce que les clients sont trop polis. Rarement, diront-ils ce qu’ils n’aiment pas et peut-être qu’ils ne pourront pas préciser ce qu’ils n’ont pas aimé.


Ayant considéré ce que le thérapeute doit faire pour créer l’alliance avec le client, nous verrons dans un prochain article ce que le client peut faire de son côté pour favoriser la réussite des rencontres, car une alliance, par définition, implique deux partis.

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